Nike x Air Afrique : quand la sneaker prend le tournant du mocassin

En 1961, la compagnie aérienne panafricaine Air Afrique prend son envol pour la première fois. Plus de soixante ans plus tard, son héritage inspire une collaboration entre Nike et le collectif parisien éponyme, aboutissant à la sortie de la RK61 : une paire de “snoafers”, contraction de sneaker et loafer, qui contribue à redéfinir ce qu’on nomme “streetwear” aujourd'hui. Derrière son apparence lisse, cette chaussure évoque un faisceau de références : à l’histoire de l’aviation africaine, à la photographie des années 1970, et surtout, à une mutation profonde du marché mondial de la sneaker.

Crédits photo : Nike, Air Afrique

Une chaussure, un manifeste 

Le nom, d’abord, agit comme un code : RK pour « flight code » d’Air Afrique, 61 pour l’année de fondation de la compagnie. Les détails confirment cette volonté de jeu de symboles : une bulle d’air pensée comme un réacteur, un intérieur en jacquard rappelant le tissage des sièges d’avion. La silhouette quant à elle, brouille volontairement les catégories. Vue de loin, on croirait à un mocassin noir verni ; de près, on retrouve l’emprunte de Nike. Elle n’est pas non plus sans rappeler les mocassins portés sur les clichés Le Voyageur (1973) et Air Afrique, nous voilà ! (1979) du photographe burkinabé Sanlé Sory, où de jeunes hommes posent en costume, mallette siglée en main et mocassins impeccables aux pieds.

Crédits photo de gauche à droite : Afrique, nous voilà ! (1979), Le Voyageur (1973) par Sanlé Sory

De la sneaker à la snoafer : mutation du marché 

Au-delà d’un clin d'œil à l’histoire, la RK61 cristallise une dynamique de fond : la sneaker classique n’attire plus autant. Si les raffles faisaient autrefois vibrer toute une génération de collectionneurs, l’essoufflement du streetwear repense les attentes. Le marché semble désormais exprimer un besoin d’intemporalité, en retournant vers des modèles de chaussures faciles à marier et durables dans le temps. Dans ce contexte le mocassin redevient un symbole puissant, puisque dans l’imaginaire collectif il s’agit d’un symbole d’élégance masculine et de privilège. La snoafer apparaît donc comme la réponse des marques de sport à cette mutation : garder le confort et les matériaux innovants de la basket, tout en s’alignant sur une esthétique plus classique. 

Le New York Times, dans une récente chronique, s’interrogeait : “Ces chaussures sont-elles hideuses ou géniales ?” Peu importe la réponse, leur pertinence tient à ce glissement de terrain : la sneaker est désormais un soulier de ville plus qu’une chaussure de sport.

Nouveaux visages, nouveaux centres

Nike et Air Afrique n’ont pas manqué de mettre en scène ce basculement dans leur campagne. Le spot montre un enfant en costume (le même déjà aperçu dans la collaboration Air Afrique x Louis Vuitton pour la collection SS25) qui semble incarner l’avenir. À ses côtés, Didier Drogba en veste de tracksuit et pantalon de costume renforce cette idée de fusion entre sport et élégance. 

Autre signal fort de ce shift : le teaser dévoilé avec Oumou Sangaré. On n’y distingue presque pas la chaussure et la chanteuse, parée d’or et vêtue d’un boubou, occupe tout l’espace visuel. Ici, le produit s’efface derrière un imaginaire. On achète avant tout une vision, pas simplement une paire de chaussures. Acquérir un accessoire pour ce qu’il représente avant même ses fonctionnalités n’a rien de nouveau. Mais en s’associant au collectif Air Afrique, Nike capte un basculement plus large, celui de la montée en puissance de l’Afrique comme centre de production d’images de mode. Longtemps considéré comme périphérique, le continent devient désormais un acteur incontournable. Le choix d’Oumou Sangaré et de Didier Drogba comme égéries, ou encore le lancement mondial de la paire en avant-première en Côte d’Ivoire, ancrent ce basculement.

Pour découvrir la Air Max RK61 avant tout le monde, rendez-vous donc le 27 septembre au concept-store Blu Lab à Abidjan.

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