MET Gala 2025 : Teyana Taylor, dandysme Noir, zoot suits et sapologie

Le 05 mai dernier Teyana Taylor portait un look custom Marc Jacobs qu’elle a imaginé avec la costumière doublement oscarisée Ruth E. Carter. Avec le thème Superfine: Tailoring Black Style, l’exposition du Metropolitan Museum of Art porte sur le dandysme Noir en s’inspirant du livre de l’auteure Monica L. Miller — Slaves to Fashion: Black Dandyism and the Styling of Black Diasporic Identity, paru en 2009.

A gauche : Teyana Taylor en custom Marc Jacobs, à droite : Ruth E. Carter

Ornée d’un durag, d’une cane, de plumes, de dentelles et de cristaux, la tenue de Teyana Taylor était habilement ostentatoire. Sur le bord d’une longue cape est brodée l’inscription “Harlem Rose”, faisant à la fois un clin d’œil au titre Rose in Harlem de la chanteuse et aux origines du zoot suit — dont on parlait déjà dans l’article sur le premier défilé parisien de Willy Chavarria — dans les salles de danse du Harlem des années 1930. Adopté par les dandys afro-américains et les Pachucos, le zoot suit est rapidement devenu un symbole de lutte contre les violences raciales. Harlem, c’est aussi le quartier qui a connu l’apogée du dandysme afro-américain à l’époque du mouvement artistique et intellectuel de la Harlem Renaissance dans l’Entre-Deux-Guerres.

Bien qu’il n’y ait aucune référence à ce sujet de la part de Marc Jacobs ou de Teyana Taylor, l’extravagance de ce costume et le respect de la trilogie des couleurs amènent rapidement à faire un parallèle avec la sapologie, mouvement congolais souvent comparé au dandysme Noir du XIXe siècle. La chercheuse Sylvie Ayimpam explique d’ailleurs dans un article que : “Les sapeurs, avec leurs vêtements griffés, leurs couleurs audacieuses, et leur préoccupation pour l’élégance vestimentaire, incarnent une version moderne et africaine de cette tradition”. Elle poursuit ensuite indiquant que : “Pour les sapeurs, l’apparence est un moyen de créer un impact, de se distinguer dans un environnement souvent marqué par la précarité.”, “Ils cultivent des attitudes spécifiques, une gestuelle et une démarche qui rappellent les dandys européens. Leur manière de se mouvoir et de parler est aussi importante que les habits qu’ils portent.”.

De manière similaire aux zoot suits, la SAPE tient ses origines dans la protestation contre la discrimination raciale, tout en étant un symbole de fierté culturelle. Bien que l’imaginaire collectif s’arrête souvent à l’aspect superficiel de la sapologie, il est important de rappeler que le mouvement débuta à Brazzaville lorsque de jeunes congolais ont commencé à réinterpréter selon leurs propres codes les habits des colons. Il s’agit-là pour Ayimpam d’une “façon de revendiquer une certaine dignité sociale” et de “contester la domination coloniale” en se réappropriant les codes de l’oppresseur.

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